Les maudits vents

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2013-01-30 --- Dans la demeure de Guayasamin

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De : Yvan – Quito

Date : mercredi, 30 janvier 2013

À : parents et amis

 

Bonjour à tous,

 

Bon ben coup donc, fallait que ça m’arrive une fois… Mais je vous avoue franchement que j’espérais m’en sauver…

 

Je me suis fait faire les poches, ce matin, dans l’autobus.

 

Ben oui…

 

Une chance que je ne trainais pas tout mon fric avec moi… J’en ai été quitte pour une perte de 35 $... Mais quand même, c’est vraiment choquant (comme de devoir payer un billet de contravention, genre) !

 

Je tenais mon sac bien serré contre moi, comme d’habitude, mais pour les poches de pantalon, je me fiais sur le fait que je sentirais inévitablement quelque chose si on essayait de s’y infiltrer. Eh bien non… Je ne me suis rendu compte d’absolument rien. Je ne m’en suis aperçu qu’en arrivant à l’école lorsque j’ai eu besoin de quelques sous.

 

Comme sentiment général, j’alterne entre la colère et l’admiration. Mais comment s’y prennent-ils donc, bon sang, pour être capable de faire ça ?! C’est bien certain que l’autobus est ultra bondé, que ça se bouscule constamment, mais je ne comprends quand même pas comment ils réussissent à entrer leur main là, sans qu’on ne sente rien ! Et à l’insu de tous les autres passagers ! Et le pire, c’est que le type en question m’a fait toutes les poches : celles de chaque côté et les deux d’en arrière. Je le sais puisque j’avais 20 $ dans celle de gauche, 15 $ dans celle de droite, et des papiers sans importance dans celles de derrière, et que tout a disparu. Ils ne m’ont laissé que mon petit change et les clés de la maison.

 

Et voilà pour ma deuxième leçon du voyage : après le coup de soleil : le coup du pickpocket…

 

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À partir de demain, donc : plus rien dans les poches, et tout dans le sac. Et le sac ? Bien serré devant moi comme je le fais depuis le début. J’aurais envie, en plus, de faire une blague. C’est-à-dire de prendre un bout de papier sur lequel j’écrirais quelque chose (en espagnol), genre : « Vas te faire foutre, sale connard ! » et de le glisser librement dans ma poche d’en arrière en espérant que quelqu’un le retire. Ce serait une sorte de revanche, non ?

 

Bon, tournons la page…

 

Aujourd’hui, après l’école, j’avais un plan, que j’ai réalisé – et j’ai même eu un cadeau en prime !

 

Personnellement, lorsque je suis en voyage, je ne suis pas un adepte de visites de musée. Mais ça m'arrive de me laisser tenter de temps à autres. C'est ce qui s'est passé avec le musée de Guayasamin. J'ai suivi en cela le conseil de J-M, de C(é) et de C(h) qui me l'avaient chaudement recommandé avant de partir. Je ne l'ai pas regretté. Oswaldo Guayasamin était un peintre-sculpteur. Il est mort récemment, en 1999, à l'âge de 79 ans.

  

Le musée est situé passablement haut, sur le flanc d’une montagne hyper abrupte, entre mon école et la maison de ma famille d’accueil. Je voulais m’y rendre à pied, mais Laly s’est offerte pour venir m’y reconduire après le dîner. Comme je suis toujours un peu mal à l’aise de refuser les offres que l’on me fait avec tant de gentillesse, j’ai donc accepté. 

  

Ça a été une très bonne affaire, finalement… La rue monte à pic (le mot est faible), et sur une longueur interminable. Je serais arrivé là-bas sur les rotules, c’est bien évident… 

 

Le musée, qui s’appelle la Capilla del Hombre, est composé de deux bâtisses : 1) un bâtiment à l’architecture inspirée d’un temple inca ; et 2) la dernière maison du peintre.

 

Le « bâtiment inca » (projet du peintre lui-même) a ceci de particulier qu’il a été construit en fonction du chiffre « 3 » : 3 étages, une salle 30 x 30 mètres, des pavés de 30 x 30 cm… Vous voyez le topo ? Je n’ai pas trop compris le pourquoi de ce concept, j’avoue. Faudra que je revienne plus lentement sur les explications. L’expo évoque en tout cas, et entre autres, l’histoire de l’effroyable exploitation des Indiens de l’Amérique du Sud, et ce par le biais des immenses peintures et sculptures de l’artiste. 

 

Je vous le dis en mille : une fois rendu devant ses toiles, ça fait bong ! Impressionnant, c’est le moins que l’on puisse dire. Voyez plutôt...

 

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Comme vous êtes à même de le constater (une image vaut mille mots), il s’en dégage tout de suite une énergie assez bouleversante.

 

Guayasamin était Équatorien, issu d’une famille pauvre (fils d’un père amérindien et d’une mère métisse), et il a été l’un des artistes sud-américains les plus dévoués aux causes de la misère, de l’exploitation, de l’oppression, de la dictature et du racisme. Et je vous passe un papier qu’on ravale de travers devant la façon dont il a exprimé tout ça… Après avoir pris connaissance de la biographie de l’homme, et vu ses toiles et ses sculptures, on comprend également pourquoi sa renommée a rapidement franchi les frontières du continent.

 

Ses immenses sculptures se retrouvent apparemment dans plusieurs villes d’Amérique et d’Europe. Si j’ai un jour la chance de me retrouver devant l’une d’entre elles par hasard, je suis convaincu que je reconnaîtrai tout de suite sa griffe tant son style ne ressemble à aucun autre.

 

J’ai commencé la visite par le « temple inca », et je suis resté là une bonne demi-heure à faire le tour ; le cœur oppressé, j’avoue, devant ses toiles un peu effrayantes. Et tant qu’à faire connaissance avec le bonhomme, je suis ensuite monté pour visiter sa maison, reconvertie en musée depuis peu de temps. 

 

Ouf… Pour un artiste dénonçant la pauvreté des masses, il ne semble pas avoir eu de remords à s’en détacher lui-même (de la pauvreté) : immense et luxueuse maison, piscine creusée, intérieur éblouissant… on est loin de la simplicité volontaire… M’enfin, j’arrête tout de suite là les remarques, car ce n’est pas de mes affaires…

 

Une fois dans le jardin, devant la piscine, le garde m’a dit qu’il fallait attendre un guide pour la visite. « Est-ce que la visite est également en anglais ? », ai-je demandé. No problema, m’a-t-il répondu avant de s’éclipser pour aller chercher un guide bilingue.

 

C’est là que le fun a commencé…

 

Une minute plus tard, une femme s’est pointée, vêtue de façon légèrement excentrique, jeune quarantaine, jolie, les yeux pétillants, souriante, et enthousiaste comme dix. Elle m’a aussitôt demandé d’où je venais. Elle a sûrement reconnu mon accent dans ma réponse puisqu’elle m’a ensuite demandé, tout de go : « Vous parlez français ? »

 

C’était les trois premiers mots français que j’entendais depuis mon arrivée ! J’ai failli me jeter à ses pieds !

 

Alors, là, mes amis, quel moment de bonheur, j’ai vécu ! Cette guide parlait je ne sais combien de langues, dont la mienne (un peu tout croche, mais je la comprenais très bien). J’ai eu ainsi droit à une visite privée – et en français ! – de la maison de Guayasamin, avec tous les détails, et en posant toutes les questions que je voulais.

 

Son très fort accent étranger m’a fait lui demander à mon tour d’où elle venait. Elle m’a appris qu’elle était d’origine russe (de Moscou) ; émigrée ici lorsque son premier mari est venu travailler pour le compte d’une compagnie de pétrole. On a parlé de Guayasamin, bien sûr, de son œuvre, de sa lutte contre l’oppression, de ses amis (dont Fidel Castro qui est déjà venu fêter une bonne douzaine de fois dans cette maison) ; mais de la Russie, aussi ; et de socialisme, de capitalisme, de la soif de pouvoir des gens, de Vladimir Poutine… Houla… j’en ai profité à plein ! Quel bonheur de pouvoir com-mu-ni-quer avec ses semblables, et pas juste en échangeant sur des sujets basiques…

 

Je suis revenu à pied en faisant attention de ne pas débouler jusqu’en bas de la montagne. Le quartier était populaire (mais exotique), mais plus je descendais, et plus ça s’enrichissait. Tout en ayant les yeux partout, je me disais que si je déménageais à Quito un jour, je n’haïrais pas du tout installer mes pénates à cet endroit… tout en haut, je veux dire, pas loin du musée…

 

Et voilà pour aujourd’hui. Pas pire, hein ? Et demain matin : une autre surprise !

 

J’avais remarqué que mon hôte, Gustavo, revenait de faire de l’exercice avant le petit-déjeuner, le matin. J’ai enfin su ce qu’il en était. Il va marcher tous les matins, pendant une heure, dans l’immense parc qui se trouve pas très loin derrière : le Parque Metropolitano Bellavista. Et il m’a demandé si je voulais l’accompagner demain matin, pour une petite visite de l’endroit… Tu parles ! Tope-la, man ! Nous avons rendez-vous à 6h15 au pied de l’escalier.

 

Le seul problème, c’est que Gustavo ne parle pas un traître mot ni de français ni d’anglais ; et il prononce très mal son espagnol. Après le moment que j’ai passé avec mon guide, ça va me frustrer au cube. J’aurais tant de questions à lui poser sur l’Équateur et sur les élections qui s’en viennent, sur ce qu’il a à dire sur le président actuel à tendance socialiste, Rafael Correa (je sais qu’il ne l’aime pas). Mais voilà : ça va malheureusement être une promenade silencieuse… 1 % d’espagnol de ma part + 0 % de français et d’anglais de sa part = une pauvre communication à 1 %...

 

M’enfin, je visiterai au moins ce parc qui me faisait envie depuis un bout…

 

Buenas noches tout le monde, et à bientôt !

 

Yvan

 

PS) Les photos à l’intérieur du musée (le « temple inca » et la maison du peintre) étaient malheureusement interdites. J’ai fait un peu le délinquant, mais pas assez à mon goût… J’aurais beaucoup aimé vous montrer les pièces de sa maison – un véritable palace ! 

 

 

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19/03/2017
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